22 août 2013

Impressionne-moi.

Du 13 octobre 2012 au 20 janvier 2013, le Musée des beaux-arts de Montréal présentait 74 chefs-œuvres impressionnistes dans le cadre d’une tournée internationale organisée par le prestigieux Sterling and Francine Clark Art Institute. Après un passage remarqué à Madrid, Milan, Giverny, Barcelone, Fort Worth et Londres, c’est à Montréal que l’exposition Il était une fois l’impressionnisme était présentée en exclusivité canadienne. Il s’agissait donc d’une chance unique de pouvoir observer les œuvres des maîtres de l’école de Barbizon, de l’impressionnisme, de l’académisme et du postimpressionnisme.

Un peu d’histoire : l’impressionnisme
 
Claude Monet (1840-1926)
Impression, soleil levant
1872
Huile sur toile
48 x 63 cm
Musée Marmottan Monet, Paris
 
« Que représente cette toile ? Impression ! Impression, j’en étais sûr. Je me disais aussi puisque je suis impressionné, il doit y avoir de l’impression là-dedans. » 
— Louis Leroy, 25 avril 1874
 
C’est à la suite de la première exposition de 1874 réunissant plusieurs artistes indépendants que Leroy, critique d’art réputé de l’époque, exprime ces commentaires teintés de sarcasme en évoquant le célèbre tableau de Claude Monet (1840-1926) Impression, soleil levant. Le terme impressionnisme est ainsi un terme péjoratif né de la critique de Leroy visant à discréditer le travail de ces artistes.
 
Bien que l’on associe les débuts de l’impressionnisme à l’exposition de 1874, la touche frétillante ainsi que les sujets si caractéristiques de ces œuvres remontent au début du siècle avec J.M.W. Turner (1775-1851) et John Constable (1776-1837). Rendant bel et bien l’impression d’un moment précis d’une part chez Turner par la dissolution des formes et d’autre part chez Constable par des empâtements grossiers et par une vision honnête (quoique quelque peu idéalisée) de la réalité, les œuvres de ces artistes ont largement influencé la peinture française du XIXe siècle. Notons aussi qu’un peu plus tardivement, Eugène Boudin (1824-1898) est l’un des premiers Français à peindre en plein air, une pratique fortement ancrée dans les traditions impressionnistes. Les artistes de l’école de Barbizon poursuivent cette lancée en peignant la forêt de Fontainebleau à de multiples reprises.
 

Eugène Boudin (1824-1898)
Fête dans le port de Honfleur
c.1858
Huile sur panneau
41 x 59,3 cm
National Gallery of Art, Washington

Joseph Mallord William Turner (1775-1851)
Pluie, vapeur, vitesse
1844
Huile sur toile
90,8 x 123 cm
National Gallery, Londres

John Constable (1776-1837)
La charrette de foin
1821
Huile sur toile
130 x 185 cm
National Gallery, Londres
 
Même si l’impressionnisme s’est d’abord imposé en France grâce à une poignée d’artistes, son influence a dépassé les frontières : le mouvement séduit de nombreux peintres, comme John Singer Sargent (1856-1925) et Mary Cassatt (1844-1926). Cette dernière devient même la première femme à intégrer le cercle impressionniste à Paris grâce à Edgar Degas (1834-1917) qui voit en elle un grand potentiel artistique. Degas initie d’ailleurs sa jeune protégée à l’estampe, une pratique encore marginale à l’époque chez les artistes européens mais dont l’esthétique japonisante charme rapidement le public.
 
Mary Cassatt (1844-1926)
Offrant le panal au torero
1873
Huile sur toile
100 x 85,1 cm
Sterling and Francine Clark Institute

Edgar Degas (1834-1917)
La petite danseuse de quatorze ans
1881
Sculpture de bronze
98 x 35,2 x 24,5 cm
National Gallery of Art, Washington

John Singer Sargent (1856-1925)
Carnation, Lily, Lily, Rose
1885-1886
Huile sur toile
174 x 153,7 cm
Tate, Londres
 
L’instantanéité, une touche frétillante, des sujets empreints de modernité (l’industrialisation, les loisirs urbains et la prostitution sont parmi les motifs les plus prisés) et une pratique en plein air sont les principales caractéristiques de ce mouvement qui aura marqué la rupture de l’art contemporain avec l’académisme, cet art officiel affiché partout dans les Salons. Notons aussi que les peintres impressionnistes se démarquent des académistes par leur subjectivité artistique qui veut que le peintre reproduise ce qu’il voit sans idéalisation aucune.
   
Vous vous doutez sûrement que je suis allée voir l’exposition Il était une fois l’impressionnisme il y a déjà plusieurs mois. Pour ceux qui n’ont malheureusement pas pu s’y rendre, je vous conseille le magnifique catalogue de l’exposition. Au cours de votre lecture, vous y découvrirez les œuvres exposées et pourrez en apprendre davantage sur celles-ci puisque chaque pièce est largement commentée par les auteurs. Bien plus qu’une revue impressionniste, l’exposition s’attardait aussi à ce qui précède le mouvement : quelques œuvres de Camille Corot (1796-1875) ainsi que de Théodore Rousseau (1812-1867) (deux éminents représentants de l’école de Barbizon) y sont exposées, rendant ainsi le développement de l’impressionnisme plus compréhensible aux néophytes.

Camille Corot (1796-1875)
Les baigneuses des îles Borromées
1865-1870
Huile sur toile
79,1 x 56,7 cm
Sterling and Francine Clark Institute

Théodore Rousseau (1812-1867)
La ferme dans les Landes
1844-1867
Huile sur toile
64,8 x 99,1 cm
Sterling and Francine Clark Institute
 
Jean-Léon Gérôme (1824-1904)
Charmeur de serpents
c.1879
Huile sur toile
82,2 x 121 cm
Sterling and Francine Clark Institute


William Bouguereau (1825-1905)
Nu assis
1884
Huile sur toile
116,5 x 89,8 cm
Sterling and Francine Clark Institute
 
James Tissot (1836-1902)
Chrysanthèmes
c.1874-1876
Huile sur toile
118,4 x 76,2 cm
Sterling and Francine Clark Institute

Par ailleurs l’exposition permettait aux visiteurs de se familiariser avec quelques autres artistes faisant carrière à la même époque mais n’ayant nullement adhéré à la branche impressionniste. On parle évidemment des peintres « officiels » comme William Bouguereau (1825-1905), Jean-Léon Gérôme (1824-1904) et James Tissot (1836-1902) ou encore de ceux qui ont poussé l’avant-garde jusqu’à sa prochaine destination, comme Pierre Bonnard (1867-1947), Toulouse-Lautrec (1864-1901) ou Paul Gauguin (1848-1903). Par ces œuvres, le visiteur saisit davantage la diversité artistique du XIXe siècle.
 
Paul Gauguin (1848-1903)
Jeune chrétienne
1894
Huile sur toile
65,3 x 46,7 cm
Sterling and Francine Clark Institute

Toulouse-Lautrec (1864-1901)
L'attente
c.1888
Huile sur toile
56,2 x 47 cm
Sterling and Francine Clark Institute

Pierre Bonnard (1867-1947)
Femmes au chien
1891
Huile sur toile
41 x 32 cm
Sterling and Francine Clark Institute
 Chez les impressionnistes, Pierre-Auguste Renoir (1841-1919) occupe, non sans surprise, une grande partie de cette exposition. On s’en serait douté : Renoir est en effet l’un des peintres impressionnistes les plus connus du public, d’abord pour ses magnifiques portraits de femmes, mais aussi pour ses nombreuses natures mortes dont la vibrance chromatique fascine le regard.

Pierre-Auguste Renoir (1841-1919)
Oignons
1881
Huile sur toile
39,1 x 60,6 cm
Sterling and Francine Clark Institute

Pierre-Auguste Renoir (1841-1919)
Baigneuse blonde
1881
Huile sur toile
81,6 x 65,4 cm
Sterling and Francine Clark Institute
 
Bref, une exposition d’envergure magnifiquement rendue par son catalogue richement illustré et commenté.

                                                                                                                                             Reproductions : Google Images

*Les reproductions dont l’auteur est en gras dans la légende sont commentées dans le catalogue de l’exposition.

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